On termine à Taormine

De Syracuse le vent oblige Coromandel à tirer des bords pour remonter la côte vers le nord, et mollit tellement qu’on se prépare à mouiller juste avant le Capo Santa Croce. Mais un coup d’oeil aux jumelles nous laisse espérer un meilleur temps droit devant… Effectivement, une fois dans le golfe de Catane une bonne brise nous permet d’atteindre le port avant la fin de journée.

De la deuxième plus grande ville de Sicile on se souviendra du noir des façades, des apéritifs Piazza Duomo face à cette drôle de statue d’éléphant portant une obélisque, et des granitas délicieuses de nonna Vicenza. On oubliera pas non plus la nuée de moustiques venant littéralement assiéger le bateau dès que le soleil disparaît du ciel et cherchant à rentrer par le moindre interstice ! A Catane le coiffeur me confie que les habitants passent leur temps à la mer. On peut les comprendre, la ville étale au sud une longue plage à deux pas du béton surchauffé : l’après-midi c’est sieste ou baignade, pas d’autre alternative.

Après 2 nuits au port le bateau repart, toujours vers le nord, avec comme tout premier objectif la minuscule réserve naturelle des îles Cyclopes devant Aci Castello. Ces gros rochers de basalte sont paraît-il ceux que le cyclope de l’Odyssée lança en direction d’Ulysse et de ses compagnons prenant la fuite.

Autour des îlots un petit périmètre signalé par des balises jaunes interdit tout mouillage et toute navigation au moteur. Heureusement on trouve pas loin une sorte de coffre auquel Coromandel peut s’amarrer le temps d’une baignade. Les fonds sont superbes, quantité de poissons dont de très belles girelles paon, et quelques étoiles de mer. On joue avec les spirographes, ces vers qui replient d’un coup leur ombrelle dans leur tube dès qu’on les approche, surprenant ! On trouve même un joli crabe plat noir à reflets bleus qui finit par se carapater entre les rochers.

Le lendemain nous jetons l’ancre dans la baie de Taormine, notre dernière escale sicilienne. Le site de l’antique Tauroménion est exceptionnel, son théatre situé sur un promontoire offre au spectateur un large panorama ouvert sur la mer, la côte au delà de Naxos et sur les montagnes environnantes, magnifique ! Le centre de la ville moderne est fait de petites ruelles et d’escaliers, de parcs où il fait bon flâner à condition de ne pas craindre la foule. Mais dès qu’on s’éloigne du périmètre piétonnier ce ne sont que routes et bâtiments d’hotel pour la plupart assez moches. Il faut imaginer Taormine il y a un siècle, sans toutes ces constructions, avec ses troupeaux et ses bergers, ses ruines mystérieuses à moitié recouvertes de végétation et ses chemins muletiers, pour comprendre pourquoi elle est devenue le lieu de villégiature de tant d’artistes. Aujourd’hui il ne reste pas grand chose du cadre qui a fait la renommée de l’endroit, la magie n’opère plus mais les touristes continuent d’affluer par milliers parce qu’on en dit beaucoup de bien dans les guides et les catalogues des agences de voyage.

Après 2 nuits au mouillage et une après-midi de visite nous quittons le pays de la granita sans avoir pu déguster celle fameuse du Bam bar de Taormina. Nathalie a testé pour nous, 45 minutes d’attente avant d’avoir le plaisir d’y goûter, faut être sacrément patient ! Le dimanche 4 août Coromandel lève l’ancre à l’aube et profite du bon vent qui souffle du détroit de Messine pour mettre le cap vers l’est, laissant dans son sillage la silhouette fumante de l’Etna. Il ne faut guère plus de trois heures au bateau pour rejoindre les côtes de Calabre. Là-bas on voit aussi de jolis bourgs perchés sur les hauteurs, mais beaucoup moins touristiques à en juger par le peu de fréquentation des longues bandes de sable sur le chemin du Capo Spartivento. Elles sont quasi-désertes, juste quelques parasols ici et là… Voilà qui nous change des plages siciliennes !