L’autre cap vert
Pour notre dernière étape en Corse nous naviguons sans grand-voile, car le vit-de-mulet est cassé, limé par une mauvaise vis. Après une courte escale à Saint-Florent, un peu trop chic, Coromandel repart par un bon vent qui sous génois seul suffit à faire avancer le bateau à plus de 5 nœuds. Malheureusement ce plaisir est de courte durée et il faut nous résoudre à utiliser le moteur pour remonter la côte jusqu’à Barcaggio tout au nord. Le long d’une route qui surplombe la mer on voit passer l’un après l’autre les villages du cap : Nonza, Ogliastro… Canari est particulièrement remarquable avec sa carrière et son usine désaffectée qui jusqu’en 65 produisait pas loin de 30000 tonnes d’amiante par an. Le moins qu’on puisse dire c’est que le paysage est marqué.
En fin de journée nous mouillons face à l’île de la Giraglia. Le cadre est sauvage à souhait et en dehors des quelques maisons de Barcaggio l’endroit est surtout peuplé de moutons. Pendant la nuit la lumière du phare de l’île balaie les falaises sur la côte, on dirait une sorte de feu-follet rapide comme un oiseau nocturne…
La Cap Corse est avant tout un cap vert. On s’en rend compte le jour suivant, même si le temps est gris les rochers de schiste, ligneux comme des troncs d’arbre, ont cette couleur qui rappelle la patine des vieilles casseroles en cuivre, le bien nommé vert-de-gris.